Première publication, novembre 2009 (révisée août 2015)
Le dernier livre de Frédéric Nef Traité d’ontologie pour les non-philosophes (et les philosophes) vient de paraître chez Gallimard dans la collection folio Essais. Une première lecture me convainc d’inciter ceux qui cherchent à comprendre la réalité ou plus précisément la réalité de la réalité à le lire car ils ne seront pas déçus. Les non philosophes trouveront présentées, dans un langage clair et explicite, les questions qui se posent aujourd’hui à celui qui veut comprendre ce qui est, en tenant compte des données actuelles de la science, qu’il s’agisse des sciences de la nature ou de celles des objets sociaux. Ils comprendront pourquoi l’ontologie est une science à part entière, celle des structures profondes de la réalité qu’il est, pour reprendre les termes mêmes de l’auteur, « inutile et incertain » de chercher à partir des structures sémantiques.
Frédéric Nef défend une ontologie des propriétés particulières qui trouvent leur cohérence dans les structures ontologiques de la réalité. Sa thèse vise à éviter le nihilisme métaphysique auquel risque d’aboutir l’atomisme métaphysique de Hume, tout en prenant acte des difficultés inhérentes à l’ontologie de la substance. Pour l’établir, il envisage, discute et évalue les solutions alternatives, permettant ainsi au lecteur, alors même qu’il est guidé vers la solution proposée, de prendre connaissance des controverses contemporaines et d’en saisir les enjeux.
Nourri des débats les plus récents, le Traité d’ontologie de Frédéric Nef donne néanmoins aux philosophes du passé la place qui leur revient dans cette quête philosophique de la réalité de ce qui est. Les scolastiques bien entendu mais aussi Platon et Aristote, Leibniz, Hume, ou encore Meinong et bien d’autres naturellement. L’inscription constante et instruite des questions d’aujourd’hui dans l’histoire de la philosophie donne au Traité un attrait qui ne pourra que séduire ceux qui ont une culture philosophique plus classique.
Ajoutons que l’auteur de ce Traité, qui fera date dans la littérature philosophique, a le souci de ses lecteurs. Une table des symboles logiques, un glossaire de plus de trente pages permettent aux néophytes de s’y retrouver, et les notes nombreuses et très détaillées fournissent aux habitués de ces thématiques des éléments pour approfondir leur réflexion. Comme son titre l’indique, l’ouvrage s’adresse bien à tous, non philosophes ou philosophes. Mais, contrairement à ce que l’on a pu lire, il ne s’agit ni d’une « cathédrale baroque » et encore moins d’un « labyrinthe infernal » mais d’une œuvre philosophique majeure, accessible et exigeante.
Dominique Berlioz