« Lorsque je descends le plus profondément dans ce que j’appelle moi, il me semble découvrir que je suis un animal vivant. »
Peter van Inwagen[1]
Le matérialisme métaphysique est un point de vue qui soutient que la nature de notre monde est entièrement matérielle. Ainsi, selon cette thèse, toutes les choses sont composées de matière et tous les phénomènes sont le résultat d’interactions matérielles.
Lorsque l’on parle des personnes, le matérialisme soutient que nous sommes intégralement des êtres matériels. Dire cela, toutefois, ne répond pas vraiment aux questions de savoir – d’un point de vue métaphysique – « Qui sommes-nous ? », « Quelles sont nos structures fondamentales ? »
Le matérialisme exclut que nous soyons quelque chose d’autre que de la matière. Une substance immatérielle par exemple – voire un hybride en partie matériel et en partie immatériel. Mais affirmer que nous sommes entièrement constitués de matière ne nous dit pas quelle sorte de chose, précisément, nous sommes.
Qu’il y ait des substances pensantes est donc écarté par le matérialisme. Que nous soyons des êtres abstraits l’est également. Mais comment répondre à la question « Qui sommes-nous ? » à l’intérieur d’un cadre ontologique matériel ?
Poser la question « Qu’est-ce que… ? » au sujet d’un arbre, d’une pierre, d’une goutte d’eau ou d’une machine peut nous amener à proposer un certain nombre de réponses qui, sans être complètes, ne seront probablement pas entièrement fausses. Mais lorsque vous vous demandez qui vous êtes, quelle est votre nature profonde et pour peu que vous interrogiez ce qu’est ce « je » avec qui vous êtes intimement connecté, et qui est, pour vous comme un centre de l’univers, les spéculations philosophiques peuvent venir alimenter nombre de constructions baroques.
Toutefois, même si l’enquête philosophique, explorant la nature du moi, tourne parfois à l’errance, quoique je sois, je ne peux douter que je suis une partie du monde et, qu’en conséquence, j’existe. C’est même ce dont je suis le plus certain de savoir.
Je sais aussi que j’ai un corps mais je peux hésiter sur la relation que j’entretiens avec lui. Le plus simple pourrait peut-être de considérer qu’entre mon corps et moi, il y ait identité. Pourquoi, en effet, chercher à dissocier deux choses qui coïncident alors qu’elles occupent exactement la même région de l’espace et du temps ? Cela écarterait l’idée que je possède mon corps – même si je pense qu’il s’agit là d’une chose un peu spéciale et unique – comme je possède certaines autres choses. Exit également l’idée d’une relation métaphysique d’un genre particulier entre mon corps et moi. Quelque chose comme : « lui c’est lui et moi c’est moi ! » – mais qu’un lien particulier relie. Donc, si avoir un corps consiste simplement à être identique à moi-même, alors il s’ensuit que je suis ce corps et rien de plus.
Cette conception, qui a l’avantage de la simplicité semble régler totalement les questions de la connexion entre ces deux entités : mon corps et moi.
C’est ainsi que nombre de matérialistes disent que la matière dont nous sommes faits compose notre corps animal et que celui-ci est délimité à la surface de notre peau. D’autres, en revanche, tout aussi matérialistes, pensent que nous sommes réduits à la dimension d’un cerveau.
On peut aussi poser la question – sans cesser d’être matérialiste – d’une autre façon. Une façon qui ne s’attarde pas sur la composition mais qui se demande si nous n’avons pas certaines parties comme des parties temporelles en plus des parties spatiales[2]. D’ailleurs, en ce qui concerne les parties spatiales, certains matérialistes soutiennent que chaque partie de la région de l’espace que vous occupez maintenant contient une chose matérielle qui est, à sa façon, une partie de vous. La division en parties peut bien sûr être, par exemple, votre tête ou votre jambe droite mais aussi votre moitié supérieure. Ici l’art de la découpe n’a pas de limite ! En revanche, certains nient le fait que nous puissions avoir des parties. Ils n’admettent alors, au sein d’une ontologie parcimonieuse, que des particules élémentaires et les organismes pris comme un tout. Ni bras, ni jambe, ni oreille[3] !
Au fond, peut-être sommes-nous bien autre chose que des êtres indépendants. Une sorte d’état de quelque chose d’autre ou un aspect de ce quelque chose, un processus, un événement… Il devient alors légitime de se demander, lorsque nous pensons que nous ne sommes pas une sorte de substance, comment on persiste à travers le temps. A moins que nous ne persistions que de courts moments, remplacés que nous sommes en permanence par une autre entité…
Se dire matérialiste ne semble donc pas spécialement, contrairement aux apparences, simplifier les choses lorsque l’on cherche à répondre à la question « Qui sommes-nous ? »
Et si nous disions que nous étions simplement des animaux – des organismes biologiques[4]. C’est vrai que nous ne sommes ni des plantes ni des pierres. Un grand nombre de personnes reconnaîtra aisément que nous avons un corps d’animal mais de là à dire que nous sommes des animaux, il y a un pas métaphysique qui, non seulement peut nous sembler difficile à franchir mais qui nous rebute. De plus, dire que nous avons un corps d’animal ne signifie pas que nous soyons cet animal ! Dire quelle sorte de chose est mon corps ne dit pas forcément quelle sorte de chose je suis. Mais quelle autre sorte de chose pourrais-je donc être si je ne suis pas cet animal ?
Certains répondent que je pourrais être une partie d’animal, un cerveau par exemple. Mais pourrait-on être une chose entièrement matérielle qui serait autre chose qu’un animal ? Etre « constitué » d’un animal, par exemple, en étant autre chose qui ne serait pas un organisme[5] ?
David Hume disait que chacun de nous est « un faisceau ou une collection de différentes perceptions, qui se succèdent les unes aux autres avec une rapidité inconcevable, et dans un flux et un mouvement perpétuels. »[6] Dans ce cas, notre corps est bien composé de matière mais nous sommes constitués de perceptions. Ce que l’on peut appeler des événements ou des états mentaux.
Un autre genre de réponse pourrait consister à tourner le dos à la métaphysique et à répondre à la question « Qui sommes-nous ? » par « Nous sommes des personnes ». Etre un animal humain n’empêche pas d’être une personne, mais cela n’a rien à voir avec le matérialisme métaphysique. Cependant, un problème se pose lorsque l’on se met à affirmer que « Nous sommes essentiellement ou fondamentalement des personnes. » Soutenir cela, c’est dire que nous aurions nos conditions d’identité en vertu d’être des personnes et non en vertu d’être un organisme ou un objet concret. Mais qu’est-ce qu’une personne ?
Sans entrer dans le méandre des tentatives de la réponse à la question, on peut associer, entre autres, la notion de personne à l’existence d’états mentaux, comme la conscience, la mémoire, l’usage du pronom « je ». Ce que l’on sait, c’est qu’un animal humain a été un embryon et qu’à cette époque il n’était doté d’aucune propriété mentale. Ainsi, on peut dire qu’un animal humain n’a pas toujours été une personne. On peut affirmer, en conséquence, que les conditions de persistance d’une personne et d’un animal ne sont pas les mêmes. Un animal humain ne peut donc être une personne que de façon contingente.
Selon l’animalisme je suis mon corps, c’est-à-dire que je suis un organisme humain vivant qui a commencé à exister comme une simple cellule (un zygote) et qui cessera d’exister lorsque ma mort biologique se produira par interruption de mes fonctions vitales. Pendant une certaine période de cette vie de mon organisme, certaines activités dans mon cerveau et mon système nerveux entretiendront un genre de conscience, dont la conscience de soi, qui me donnera le droit d’être décrit comme une « personne ». Mais, il est sûr que j’aurai existé bien avant d’être cette personne et il se pourrait bien que je cesse d’en être une avant ma propre mort ! Je ne suis donc pas essentiellement une personne puisqu’une propriété essentielle est une propriété sans laquelle la chose qui la porte cesse d’être cette chose. Mes conditions d’identité sont seulement celle d’un organisme humain.
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Il est probable que la principale raison de contester que nous sommes des animaux est l’hostilité au matérialisme. Cette objection se base sur l’idée qu’aucune chose matérielle ne peut penser ; et cette idée est incompatible avec celle que nous sommes des animaux. L’idée à la base de cette objection est que l’animal, que nous appelons « le corps », existe mais ne pense pas ou s’il pense, que cela ne se passe pas de la manière dont, nous le faisons.
Si on soutient l’idée qu’un animal ne pense pas, qu’il n’est pas plus équipé qu’une pierre pour cela, on veut en fait signifier qu’il n’a que des propriétés matérielles et qu’en conséquence, seule une chose immatérielle peut penser. Mais est-ce vrai ? Dénier qu’une chose matérielle puisse penser n’explique pas pourquoi elle ne le peut pas !
On pourrait dire que les animaux humains ne pensent pas parce qu’ils sont seulement des corps et qu’un simple corps ne pense pas. Dire que le corps de René, par exemple, croit en Dieu ressemble à une plaisanterie. Mais cette affirmation, qui nous semble d’emblée ridicule, ne signifie pas qu’elle soit fausse. En effet, bien qu’un énoncé comme « le corps de René croit en Dieu » nous parait saugrenu, il ne nous permet pas d’inférer que le corps de René soit incapable de penser. En fait, nous devrions nous méfier de certaines conclusions métaphysiques sous prétexte que l’on ne peut pas toujours substituer « le corps de René » avec la simple expression « René ».
On pourrait aussi soutenir que certaines choses matérielles peuvent penser mais pas l’animal. Autrement dit, qu’une partie du corps seulement pourrait penser – le cerveau j’imagine – et que c’est seulement en un sens dérivé que l’on dit que l’animal pense. Bref, que les animaux logent un organe intelligent qui, lui, pense !
C’est vrai que notre cerveau est bien l’organe de la pensée. Nous pensons avec notre cerveau et pas avec notre foie ni nos pieds. Comme l’aurait dit Cabanis : « Le cerveau est un viscère destiné à la produire [la pensée], comme l’estomac à opérer la digestion et le foie à filtrer la bile[7]. » Beaucoup de philosophes de l’esprit soutiennent que si quelque chose de matériel pense, c’est bien le cerveau ; ou que si quelque chose de matériel est conscient, c’est encore lui, le cerveau ; ou encore que si les états mentaux sont des états de quelque chose, ils sont des états du cerveau. Mais si le cerveau pense, cela suggère que l’animal humain qui porte le cerveau pense, mais seulement de façon dérivée. Le cerveau, quant à lui, penserait dans le vrai sens du terme. Donc, je serais mon cerveau ! Je pèserais environ 1 kg ½ et ressemblerais à une masse gélatineuse logée dans le crâne d’un animal. Dans le miroir, celui que je verrais ne serait alors que le masque d’une chose que je ne percevrais pas.
Il est vrai que je ne peux pas éprouver certains sentiments ni avoir certaines pensées sans un cerveau qui fonctionne correctement. De la même façon que je ne peux pas marcher si je n’ai pas des jambes qui fonctionnement correctement. Mais, sont-ce mes jambes qui courent ? Et est-ce mon cerveau qui pense ? L’animalisme considère que ce n’est pas mon cerveau qui pense en un sens strict car le « je » qui pense est identique à un corps considéré comme un tout et non pas un organe, fut-il formidable d’un point de vue fonctionnel, à savoir le cerveau.
C’est ici que les objections s’articulant autour d’histoires de cerveaux que l’on pourrait décérébrer et qui continueraient à fonctionner hors du crâne d’origine ou transplantés dans d’autres crânes nourrissent nombre de scénarios d’expériences de pensée[8]. Toutes cherchent à démontrer que c’est bien une partie de l’animal et une partie seulement qui a des sentiments et des pensées. Les intuitions que portent nos rêves (ou nos cauchemars) de science-fiction mettant en scène des greffes de cerveau et autres fissions et transplantations, hantent littéralement l’argumentaire qui cherche à nous donner des raisons de penser que nous sommes notre cerveau, en vivant détaché du reste de notre corps. Mais avons-nous de bonnes raisons de croire que nous sommes notre cerveau ?
Selon cette thèse, c’est bien une partie seulement de notre corps qui, en un sens strict, pense. Certaines parties de notre corps ne semblent, en effet, pas être impliquées dans la production de notre pensée : nos orteils par exemple. Mais quelle partie de mon cerveau est véritablement impliquée lorsque je pense ? Personne ne sait comment précisément les cellules nerveuses produisent la pensée et l’expérience consciente, mais on sait que cela a un certain rapport avec elles, disons que les manifestations de l’esprit sont bien corrélées avec certaines activations neurales. Ce qui est difficile pour cette thèse matérialiste qui soutient que nous sommes un cerveau, c’est de déterminer quelle parcelle précise du cerveau nous sommes lorsque nous pensons. Lorsque nous marchons, certes nos jambes sont de la partie, mais le cœur aussi, l’épine dorsale, les bras, etc. Incontestablement, certaines parties de l’organisme paraissent plus impliquées que d’autres dans l’activité de la marche mais il demeure curieux d’exclure une partie de l’organisme de cette activité. Le cerveau est bien sûr directement engagé dans le travail de l’esprit ; et dans le cerveau, certaines zones plus particulièrement que d’autres. L’anatomiste distingue l’organe du reste de l’organisme parce que l’ensemble de ses fonctions se distingue des autres organes mais sa frontière n’est pas aussi nette que nous le montre une coupe du cerveau sur une image[9]. C’est donc bien dans un sens assez relâché qu’il faut comprendre la notion d’organe de la pensée lorsque l’on parle du cerveau.
Ce rapide survol – bien incomplet – des positions ontologique au sujet de la personne humaine dans la perspective matérialiste montre que la question élémentaire « Qui sommes-nous ? » se déploie dans de nombreuses ramifications. La conception matérialiste de la personne a l’avantage de la simplicité et tend à éviter toute spéculation à propos de la relation entre le corps et l’esprit. Toutefois, cette conception matérialiste, lorsqu’elle prend la forme de l’animalisme, entre en conflit avec le problème de l’identité personnelle qui revendique le fait que nous sommes ce que nous sommes car nous avons essentiellement certaines propriétés mentales qui font la différence avec l’animal qui pense. On peut cependant se demander comment les partisans de ce ces thèses alternatives à l’animalisme font-ils pour savoir qu’ils ne sont pas des animaux[10] !
Références
[1] « Dualism et Materialism : Athens and Jesrusalem ? » Faith and Philosophy 12, 1995.
[2] Une métaphysique des parties temporelles soutiendra que les objets ordinaires ont des parties temporelles comme un processus. Un billet du blog de Quentin Ruyant intitulé « Les paradoxes de l’identité » présente cette façon pour un objet de persister en « perdurant ». Notion initiée par le philosophe David Lewis.
http://philosophiedessciences.blogspot.fr/2015/08/les-paradoxes-de-lidentite.html
[3] Voir l’interview d’Eric Olson sur le site 3M : http://www.3ammagazine.com/3am/the-philosopher-with-no-hands/
[4] La thèse de l’animalisme est particulièrement soutenue par Eric Olson, Peter van Inwagen, Paul F Snowdon… Voir l’article dédiée à cette entrée dans la Stanford Encylopedia.
[5] La thèse dite de la « constitution » est soutenue par Sydney Shoemaker et Lynne R. Baker en particulier.
[6] Traité de la nature humaine, paragraphe 4.
[7] Charles de Rémusat, « Cabanis », Revue des Deux Mondes, t.8, 1844.
[8] On peut se faire une idée du débat qui convoque des scénarios de science-fiction en lisant la traduction de l’article de Derek Parfit, « Nous ne sommes pas des êtres humains », par Nil Hours, sur le site du séminaire de Métaphysique d’Aix en Provence.
[9] Voir Eric Olson, What are we ?, A Study in Personal Ontology, 2007, chapitre 4. On peut lire la recension très complète du livre d’Olson par Nil Hours, toujours sur le site du Sema d’Aix en Provence.
[10] « Pourquoi nous sommes des animaux ? », texte d’Eric Olson traduit en français par G. Lenclud, Terrain, 52, 2009, p. 79-95. L’article présente de façon claire la thèse de l’animalisme.
1 Commentaire
Merci beaucoup pour cet exposé succinct, touffu, et très pédagogique.
Je vous demande votre patience avec mon inculture, dans les remarques peut-être un peu désordonnées que je vais vous adresser.
Il me semble que ce qu’on appelle la révolution darwinienne bat en brèche la foi de nos ancêtres qu’ils n’étaient ni animaux, ni dieux, ni anges, mais appartenaient à une catégorie intermédiaire, distinct. Dans une certaine pensée juive (et chrétienne), ce statut intermédiaire, sur une échelle hiérarchique, était même supérieur à celui des anges, (et des animaux) car la possibilité pour l’Homme de choisir entre bien et mal lui donnait une liberté qui n’était ni celle des anges, ni celle de l’animal.
Ce statut intermédiaire (et la liberté qui l’accompagnait) a chuté avec l’acceptation générale des thèses de Darwin (et pas que..) pour laisser en sa place l’idée que l’Homme était un animal parmi d’autres. La révolution cosmogonique se situe précisément ici, dans une nécessité d’élaborer une autre réponse à cette question « qui sommes-nous ? »
Je vois un exemple frappant d’un certain matérialisme dans ce chapitre pour moi hallucinant dans « Le Discours… » de Descartes, où ce dernier se met à décrire de manière o combien objective (à ses yeux..) l’ORGANE du coeur. N’étant pas du tout spécialiste, et lisant en autodidacte, je suis tombée sur cette description o combien scientifique, au sens de la nouvelle cosmogonie, avec une très grande irritation.
Il m’a fallu une grande étincelle d’imagination pour comprendre (peut-être à tort) que Descartes tenait comme à la prunelle de ses yeux à insuffler une nouvelle littéralité à ce (beau…) figuré métaphorique qui entourait le coeur, et ses raisons que la raison ne connaît point. Descartes semble tenir à réduire le coeur à sa dimension d’organe pourvue d’une fonctionnalité (utilité) et rien d’autre.
Nous nous débattons toujours dans l’héritage de ce matérialisme cartésien qui nous clive/scinde en entité matériel et spirituel, et nous avons un mal incroyable à dépasser l’idée que nous AVONS un corps, pour ETRE un corps. On pourrait être un corps et… une grande interrogation sur laquelle on tirerait le rideau pour le laisser derrière, dans l’ombre, et hors de vue, en renonçant à savoir.
Sur notre appartenance à la catégorie animale, il me semble intéressant de se poser la question (si on accepte les thèses de Darwin, qui après tout, n’était qu’un homme, et pas un dieu/Dieu, donc, faillible), si nous sommes des animaux, en quoi sommes-nous différents ET semblables aux autres animaux ? J’aime bien l’idée que chaque espèce est unique et singulière, comme chaque sujet est unique et singulier, même s’il ressemble aux autres comme deux gouttes d’eau, et si des ressemblances réunissent tout le vivant.
Pourquoi forcément nous imaginer que nous serions les seuls animaux qui pensent ?
Pourquoi notre obstination à sacraliser la pensée, d’autant que nous réduisons la pensée à l’heure actuelle à des conduites que nous qualifions d’intelligentes, dans un sens très restrictif ? Cela me semble… très dangereux.
Enfin, je vous recommande un livre que je lis avec difficulté, mais passion en ce moment : Daniel Arasse, « La guillotine et l’imaginaire de la Terreur ». Arasse cite abondamment Cabanis, et ces théories réductionnistes qui nous enferment dans des têtes prison. Arasse a des choses étonnantes à faire remarquer sur la guillotine et ces théories.
On peut aimer les théories réductionnistes. Elles viennent à point pour les paresseux, et rassurent à une époque où les gens ont beaucoup besoin d’être rassurés, surtout ceux qui se donnent pour mission de rassurer les autres, tout en revendiquant leur liberté. Et enfin, elles se conjuguent à merveille avec les extrémismes qui nous agitent collectivement ET individuellement à l’heure actuelle.
Encore merci.
Cordialement.