L’Anti-Hume de Frédéric Nef

Si les questions métaphysiques[1] les plus centrales prennent la forme de « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? », « Qu’est-ce qui existe ? » ou « Qu’est-ce qui est fondé sur quoi ? », la question ontologique à laquelle Frédéric Nef dans son ouvrage L’Anti-Hume, de la logique des relations à la métaphysique des connexions, qui vient de paraître aux éditions Vrin, commande de répondre est celle-ci : « La réalité est-elle juxtaposée ou connectée[2] ? » Dans un livre, qui aurait pu aussi s’intituler « Une leçon sur la connexion », le métaphysicien repense la nature d’un lien quelque peu oublié, le conjugue aux problèmes métaphysiques les plus actuels et nous propose un plaidoyer en sa faveur qui fera date.

 

 

Le livre de Frédéric Nef fait logiquement suite à deux précédents ouvrages, L’objet quelconque en 1997 et Les propriétés des choses en 2006, livres dans lesquels l’auteur apportait, postulant l’existence d’objets (concrets et abstraits, complets et incomplets, singuliers et génériques) et soutenant que les propriétés de ces objets étaient particulières (non universelles), une contribution remarquable à l’ontologie générale. La trilogie se complète donc ici par l’examen de la liaison entre les objets et les propriétés, et précise le type de « ciment[3] » qui attache ces entités entre elles et qui constitue le monde. Et ce que L’Anti-Hume défend ici c’est la connexion.

Pourquoi la connexion ?

On le sait, le sentiment philosophique est suscité par l’étonnement[4]. Nous regardons autour de nous, nous voyons des objets posés les uns à côté des autres… « Nous contemplons un ciel d’août… Ecrasés par ce spectacle sublime et grandiose, nous ne pouvons pas ne pas déplorer intérieurement l’absence de liens entre les étoiles, entre les planètes[5] », et c’est ainsi, que saisis par l’infini désordre du monde – et qui pourrait devenir inquiétant ­–, perce les questions : « Qu’est-ce qui fait tenir le composé ? Qu’est-ce qui fait tenir ensemble les choses du monde et parmi les choses que nous discernons, qu’est-ce qui fait que ce qui compose ces choses tient ensemble ? » Il s’agit de savoir si la réalité est connectée ; si la connexion existe ou si elle n’est qu’une illusion. Et, en arrière-plan de ce problème se dissimule l’autre question métaphysique : celui de la nature du tout (ou des touts). L’enquête à laquelle nous soumet Nef est donc bien métaphysique : on est à la recherche de la réalité profonde ou des structures ontologiques de la réalité naturelle[6].

Le sujet de la connexion constitue dans la littérature philosophique française un espace vierge et bien que l’auteur dans son ouvrage défende une position clairement argumentée, il prend aussi le temps de spécifier et de définir au long de cinq chapitres (1. Connexion, relations et atomisme logique ; 2. Les deux ontologies fondamentales : pointilliste et connectée ; 3. Nexus, dépendance, relation ; 4. Connexion et unité ; 5. Représenter formellement la connexion) des différences conceptuelles cruciales (relation et connexion, dépendance et connexion) des thèses métaphysiques qui s’affrontent (métaphysique pointilliste vs métaphysique connectée ou essentialistemonisme vs pluralisme), d’exposer les conséquences que l’on a de soutenir l’une ou l’autre de ses deux thèses (la topologie temporelle, la causalité, la distinction entre véritable et pseudo connexion), de distinguer deux niveaux de connexion (matérielle et formelle[7]), et de montrer également tout le travail qu’il reste à faire lorsque l’on s’ouvre à la métaphysique de la connexion (lien entre ontologie et logique, mise au point d’une théorie connexionniste de la causalité).

Cependant, d’emblée, l’examen se heurte à un obstacle et c’est celui de l’accès : comment peut-on saisir ce qui n’est pas, à première vue, possible de percevoir ? C’est en partie l’objet du premier chapitre que l’auteur examine. La connexion est ce qui lie mais pour certains auteurs elle n’existe tout simplement pas et la recherche de ce lien n’est alors que peine perdue : pas de soudure cause-effet, sujet-prédicat ni d’accolement d’instanciation ou d’exemplification entre la propriété et la chose. David Lewis précisément, contre toute idée de connexion exprime, un point de vue radical : « … réifier les liens non relationnels et en donner une théorie est une chose tout à fait incorrecte. » Ainsi lorsque Nef enquête sur la nature de ce lien et prend le parti d’affirmer son existence, il prend aussi l’exact contre-pied de Lewis, et juge qu’un certain échec de l’atomisme russellien[8] est justement dans l’absence de connexion entre les états de choses. C’est bien contre cette image métaphysique de choses disposées telle une mosaïque, qui selon l’auteur ne correspond pas à la physique moderne, que se dresse l’enquête[9].

 

Réalité atomiste ou réalité connectée ?

Cette image mosaïque d’une réalité atomiste s’oppose donc celle de la réalité connectée. Deux pôles, deux ontologies se font face : soit il existe un lien entre les choses, soit elles sont simplement les unes à côté des autres. Pour Hume, le ciment de l’univers est constitué de la contiguïté, de la ressemblance et de la causalité. C’est ainsi que, selon le philosophe empiriste, le ciment se fabrique dans notre esprit. Tout le programme de Nef consiste alors à mettre sur pied une métaphysique réaliste de ce ciment, c’est-à-dire indépendante de notre psychologie.

L’obstacle est donc clairement désigné, son auteur porte un nom : c’est la philosophie de David Hume – d’où le titre de l’ouvrage. C’est que, selon le philosophe écossais, la connexion nous est inaccessible. Nous ne percevons pas ce qu’il appelle le « ciment » de l’univers[10].

Le chapitre deux est alors consacré aux deux thèses qui s’opposent, à savoir, le pointillisme et la connexion mais est surtout l’occasion pour l’auteur de passer au crible l’interprétation qui est faite du rejet de la connexion que Hume revendique. Trois points sont abordés : 1. l’indépendance des états de choses, 2. la causalité vidée de la connexion, 3. la distinction entre véritable et pseudo connexion.

L’indépendance entre les faits ou états de choses a pour conséquence qu’il n’existe pas de pouvoirs causaux, autrement dit pas de nexus causal et suivant Wittgenstein dans le Tractatus (5.36 et 5336.1), que la croyance dans le nexus causal est une forme de superstition. Comment alors expliquer la causalité sans nexus causal ?

Ce que Hume écarte est, lorsque nous invoquons une relation causale, la connexion nécessaire, qui lorsque nous prétendons la percevoir, n’est au fond qu’un produit de l’esprit – un sentiment, une impression – qui vient nourrir une habitude. Néanmoins, Hume, nous fait remarquer Nef[11], a très souvent recourt au terme « connection » (233 fois dans le Traité) et le mot peut alors être associé à un certain nombre d’autres comme Efficacy, agency, power, force, energy, necessity, productive quality, autant de vocables relatifs à l’action et qui, selon l’auteur, impose de bien distinguer une interprétation épistémologique et psychologique d’un côté, d’une troisième voie faisant appel à des « causes secrètes[12] ».  Quoi qu’il en soit, comme la connexion nécessaire, le pouvoir secret dont parle Hume, nous ne pouvons le découvrir. Chaque tentative de le discerner n’est, en effet, qu’une décevante détermination de l’esprit acquise par l’habitude. Et c’est ainsi que selon Hume, le « ciment de l’univers » n’est pas une connexion réelle au sens de nécessaire. Cette connexion n’est qu’une conjonction constante de choses séparées. Toutefois, il existerait une connexion réelle, que Hume nomme « secrète » – secrète car elle serait inaccessible à notre connaissance[13].

Si l’on récapitule, la métaphysique humienne se caractérise par le caractère pointilliste d’une l’ontologie qui, rejetant les connexions nécessaires, contient comme éléments ultimes des points de l’espace-temps. La thèse de la survenance humienne de David Lewis en est aujourd’hui la forme.

Connexion et relation

En revanche pour Nef – contre Hume et Lewis –, la connexion joue deux rôles distincts : lier les touts organisés en assurant leur unité interne ou extrinsèque (par exemple la connexion des organismes) et constituer les objets, autrement dit produire une unité par connexion des parties. Cette description des rôles de la connexion doit s’entendre, et l’auteur y insiste dès le premier chapitre – et il y reviendra tout au long de l’ouvrage tant la dispute sur le sujet est manifeste[14] –, au sein d’une différence cruciale : celui d’avec la relation.

La différence déterminante que l’on peut d’emblée considérer entre la relation et la connexion, c’est que la première n’a pas d’existence ontologique alors que la seconde y prétend. Mais ne parle-t-on pas de relations internes ? Il est évident qu’il existe des relations externes « être à la droite de » par exemple, qui ne sont en rien assimilables de près ou de loin à des connexions, mais il y a aussi des relations internes (une connexion spatiale entre un chemin et une région, entre un fils et un père) mais ce ne sont toujours pas des connexions. Ce sur quoi Nef insiste, c’est que non seulement il n’y a pas d’identité entre les relations et les connexions mais qu’à l’instar de Jonathan Lowe[15], les relations n’existent pas[16]. Et il fait remonter cette idée à Occam[17], voire à Leibniz pour qui les relations sont des êtres cognitifs[18].

Les relations pourraient donc bien n’être que des projections mentales sur la réalité. Dans ce cas elles seraient externes. Et lorsqu’elles sont internes, elles seraient des propriétés conjointes comme par exemple la relation entre un fils et son père. En revanche, la connexion entre un ADN et un individu x est ce qui rendra vrai un énoncé « x est le fils de y ». Ici, la vérifaction (truthmaking) – ce qui rend vrai une prédication – est la connexion. En affirmant cela[19], le métaphysicien veut signifier qu’en plus des propriétés intrinsèques des choses, il existe quelque chose en plus de ces choses dans le monde – et qui ne sont pas des relations. Mais pourquoi ne pas envisager de se passer de connexions et de faire faire par les relations tout ce que font les connexions[20] ? C’est qu’en connectant x et y je produis z qui n’est pas non plus la somme méréologique de x et de y[21].  Dans une relation interne ou externe, il n’y a pas de production. Une relation externe de relation spatiale ne produit rien. En revanche, une connexion neuronale par exemple, cause des excitations, transmet des impulsions ; elle peut aussi inhiber l’impulsion ou renforcer la connexion.

On peut toujours toutefois penser que le monde est composé d’entités indépendantes. Mais une telle image métaphysique ne pourra cependant envisager que des relations entre ces entités. Cela pourrait même conduire à penser que rien n’existe. On peut en effet envisager que la réalité se distribue autrement que dans les divisions habituelles auxquelles nous accédons naturellement (les organismes, les artefacts, etc.). Peut-être qu’en affirmant que nous, les êtres humains, nous existons, nous procédons à une addition inutile qui survient sur les ensembles de points dans l’espace logique ou physique. Mais comment, dans ce cas, penser un principe interne d’identité à travers le temps, demande Nef ? En fait,

 

la connexion est, ni plus ni moins qu’« un réquisit absolu à toute ontologie, substantialiste ou pas. »

Et il ajoute [22] :

 

« En effet, tout composé, de quelque niveau que ce soit, requiert un lien qui l’installe puis le maintienne dans son unité »

Cette unité des entités situés au niveau de notre perception (le niveau mésophysique), dans la mesure où l’on admet qu’elles sont constituées d’éléments plus petits conduit le philosophe à considérer trois positions : 1. Cette unité est une fiction ; les touts n’existent pas (nihilisme) – 2. Les touts quels qu’ils soient existent (universalisme) – 3. Il existe des faits bruts, qui échappent à l’analyse, de composition (brutalisme). Aucune de ces positions philosophiques ne postule la connexion entre les éléments composant l’unité. Pourtant nous avons l’intuition que cette connexion, bel et bien, existe. On peut se demander aussi pourquoi dans chacune de ses positions postuler des objets ? Autrement dit – la question métaphysique réapparaît – « Qu’est-ce qu’un objet ? » C’est ici, que Nef pose l’objet comme un nœud de connexions entre des propriétés et avec des propriétés[23].

Le nexus psychophysique

Une seconde distinction que l’auteur nous soumet (chapitre trois) à propos de la connexion, est que celle-ci n’est pas la dépendance. Entre la dépendance et la relation interne, il y a la connexion[24]. Dans ce chapitre, la question que pose Nef est celle de l’existence d’un nexus. Il écrit : « Le nexus est à la connexion ce que l’énoncé est à l’énonciation, la cause à la causation[25]. »

C’est ici l’occasion pour l’auteur d’examiner le nexus entre le corps et l’esprit. La survenance qui est le lien privilégié des philosophes de l’esprit n’est, comme l’écrit Thomas Nagel[26], que le signe de quelque chose de plus fondamental que nous ne connaissons pas encore. Une fois encore, l’auteur nous exposant la position de Nagel qui, après avoir posé l’irréductibilité du mental et du physique fait l’hypothèse de l’existence d’une connexion nécessaire entre les deux domaines, en appelle à une scientificité d’un type nouveau, montre bien tout l’aspect spéculatif (programmatique ?) de la notion de connexion, c’est-à-dire qu’en affirmant que la connexion psychophysique est forte et nécessaire cela revient à ne rien dire sur la connexion ou que soutenir qu’elle est sous-jacente à la survenance n’est pas la définir[27].

Ce nexus psychophysique s’articule parfaitement avec le panpsychisme[28] qui considère que le mental est constitutif de la nature. Ainsi, connexion et panpsychisme, vont pour l’auteur dans le même sens[29]. Et ce sens n’est ni plus ni moins qu’une remise en cause des modèles évolutionnistes et réductionnistes fondés sur une philosophie mécaniste.

L’unité du monde

La question de l’unité du monde (chapitre quatre) demeure épineuse. Le monde est un tout et n’est attaché à rien – le problème de sa cohérence se situe donc bien au-delà de ce qui attache deux choses entre elles. Dans ce chapitre intitulé « connexion et unité » Nef interroge les métaphysiques qui ont dans l’histoire théorisées la connexion (le stoïcisme et le pneuma ; Leibniz et le vinculum) et revient sur l’opposition entre les conceptions de l’atomisme et du monisme. Pour l’atomiste ou pluraliste, les parties sont premières par rapport au tout. En revanche pour le moniste le tout est premier ; le cosmos est fondamental. Nef précise bien que le moniste ne nie pas l’existence des atomes ou des molécules[30]. La question est celle de savoir comment le tout se divise en particuliers. Mais une ontologie de particuliers n’impose-t-elle pas de penser l’existence de simples (des individus qui ne se divisent pas) ? On pourrait aussi, à l’inverse, penser un tout qui ne s’arrête pas – une ontologie de gunks[31] – mais un tel monde serait sans connexion. Et si le monde, et les objets étaient des sous-graphes du graphe du monde ? C’est la tentative de Randall Ripert de construire un concept formel de connexion, une structure mathématique du monde que l’auteur analyse et qui se demande si la connectivité d’un tel graphe permet de penser la connexion ontologique.

Le dernier chapitre approfondissant la nature du lien entre ontologie et logique explore les formalisations de la connexion dans les domaines de la syntaxe formelle, la méréologie et la topologie. Le problème que soulève Nef est alors celui de la réflexivité de la connexion, qui, admise dans les calculs de la connexion, pose un problème métaphysique.

*

Un tel ouvrage de métaphysique, s’il est un outil essentiel de la recherche en métaphysique, tant par son érudition (il s’agit bien là d’un enseignement) que par le caractère d’une thèse réellement entreprenante d’un point de vue philosophique intéressera certes le philosophe professionnel mais pourra déclencher chez le lecteur éclairé, un désir d’exploration dans tout le champ de la métaphysique. Il apparaît en effet, qu’il est impossible d’isoler une question métaphysique et L’anti-Hume de Nef en est le parfait exemple.

En lisant le livre de Frédéric Nef, j’ai souvent repensé à ce projet que j’avais d’écrire un papier, en écho à la question de Thomas Nagel « quel effet cela fait d’être… ? » (« What is it like to be… »), – ou ce que l’on pourrait appeler un « lien subjectif » – qui émerge lorsque l’esprit s’ajuste à certaines questions métaphysiques. C’est certainement une tâche ardue. Cependant, en suivant le chemin auxquelles les questions de Frédéric Nef nous invite ici d’emblée, et pour peu que nous laissions le sentiment philosophique de l’étonnement nous envahir, le souci du métaphysicien, celui de réclamer que les choses du monde ne volent pas en éclats, progressivement, au fil de la lecture (de l’étude ?) distille en vous cet effet remarquable.

 

Références

[1] Voir le livre de Peter Van Inwagen, La métaphysique.

[2] P. 21.

[3] La métaphore du ciment rappelle Nef, p. 30, qui remonte à Hume, a été reprise par John L. Mackie The ciment of Universe, London, Clarendon Press, 1980 et récemment par Claudine Tiercelin Le ciment des choses, Paris, Ithaque, 2011.

[4] « Le sentiment philosophique : s’étonner. C’est l’origine même de la philosophie. », Platon, Théétète, 115 d ;

« L’étonnement est ce qui, toujours, pousse les hommes à philosopher. », Aristote, Métaphysique, 982 b 11.

[5] P. 9.

[6] P. 28.

[7] Les connexions matérielles sont les assemblages comme le vissage, le clouage, le chevillage, etc. La connexion entre deux lieux, entre deux appareils sont aussi des connexions matérielles. Les connexions formelles sont celles qui relient les entités abstraites (universel et particulier, etc.)

[8] L’atomisme logique est une doctrine philosophique soutenue par Bertrand Russell et Ludwig Wittgenstein. Elle rejette le monisme et soutient un pluralisme irréductible dans le monde.

[9] P. 32.

[10] Il convient cependant de nuancer. Inaccessible à l’intuition et à la perception, la connexion, au sens strict du terme, nous échappe. Cela pourrait bien expliquer, explique Nef, p. 27, pourquoi la métaphysique de la connexion est restée dans l’ombre et que l’idée de l’atomisme s’est développée.

[11] P. 76.

[12] ». Ce que Hume désigne du terme « secret » – qui sont des causes agissantes ou des pouvoirs – ne sont pas, selon Nef, ce que dans la littérature contemporaine on appelle des dispositions (« Les dispositions sont des pouvoirs secrets, mais les pouvoirs secrets sont-ils des dispositions ? », p. 78).

[13] P. 64.

[14] On peut se reporter à la contribution de F. Clementz « Un peu de liant :  des relations aux connexions et retour » dans Le renouveau de la métaphysique : autour de Frédéric Nef, [à paraître chez Vrin], qui ne voit pas la nécessité d’opposer la connexion à la relation.

[15] https://www.youtube.com/watch?v=igdRsbqUtJI Pour LOWE les véritables relations sont externes et ne surviennent pas sur les propriétés intrinsèques des relata. Les relations internes sont des cas de prédication formelle dans lesquelles aucune véritable propriété n’est prédiquée du sujet. Les véritables propriétés sont, elles, prédiquées par des prédications matérielles sur les sujets de prédication.

[16] Certes il y a des prédications relationnelles qui sont vraies « André aime Régina », « fumer cause le cancer », etc. Mais la question qui se pose est celle de savoir si ces prédications ont de véritables vérifacteurs. Comment expliquer ces vérités ? (Les relations qui ne requièrent pas de vérifacteurs sont habituellement décrites comme des relations internes.) La question se pose de savoir quel est le statut ontologique des relations. On peut penser que les prédications relationnelles sont inéliminables pour dire les faits de la science mais que les vérifacteurs de ces prédications n’existent pas. Si les prédications relationnelles avaient des vérifacteurs cela signifierait qu’en plus des propriétés intrinsèques des choses, il existerait quelque chose de plus qui sont des relations. Une métaphysique qui postule des pouvoirs, qui sont intrinsèques à leurs porteurs et qui, lorsqu’ils se combinent de façon appropriée produisent une certaine manifestation pourrait constituer une base réductive à ces relations.

[17] « En dehors des choses absolues, à savoir les substances et les qualités, on ne peut imaginer autre chose qui existe, ni en acte, ni en puissance. » Somme logique, Première partie, chapitre 49, « La relation », trad. fr. J Biard, Mauvezin, Trans europ Repress, 1988, p. 160.

[18] Bien que pour Leibniz, les relations inhèrent aux choses, p. 47.

[19] P. 37.

[20] P. 117.

[21] P. 111.

[22] P. 41.

[23] P. 57.

[24] Pour Nef, (note de bas de page n° 2, p. 97), le concept d’Influence initié par David Lewis dans ses dernières versions de l’analyse de la causation est proche de la notion de connexion.

[25] P. 98.

[26] « The psychological nexus » in Concealment and Exposure and Other Essays, New York, Oxford University Press, 2002.

[27] P. 110.

[28] Littéralement, le panpsychisme est la doctrine qui soutient que toute chose a un esprit. En fait, ceux qui soutiennent le panpsychisme ne défendent pas une telle doctrine. Cependant, ils estiment que l’esprit est une structure fondamentale du monde. Le panpsychisme se distingue de l’idéalisme et du matérialisme mais aussi du dualisme, qui admet deux domaines d’entités différents qui agissent indépendamment l’un de l’autre. Ce qu’affirment les panpsychistes c’est que le mental est une structure de l’univers mais qu’elle n’est pas la seule. Il existe un grand nombre de manières de soutenir cette métaphysique. Parmi les plus récentes, on trouve celle qui allègue que le langage de la physique ne peut pas circonscrire le soubassement ultime de la réalité mais qu’à ce soubassement ultime il est nécessaire d’y adjoindre des faits intrinsèques qui échappe au vocabulaire de la physique.

[29] P. 111.

[30] P. 144.

[31]  Ce terme désigne une somme méréologique composée de parties qui ont des parties, etc. Une ontologie de gunks s’oppose à celle de simples. Dans cette ontologie, il n’y a pas de fondation ultime dont tout dépendrait (note n°1, p. 145.)

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